Gambie : un bébé meurt après son excision

La mort de cette petite fille d’à peine un mois relance le combat contre les mutilations génitales, toujours pratiquées dans le pays malgré leur interdiction depuis une décennie.

La police gambienne a annoncé dans un communiqué l’ouverture d’une enquête sur les circonstances du décès d’un nourrisson d’un mois des suites d’une excision dans le village de Wellingara, dans la banlieue de Banjul, la capitale.

Deux femmes soupçonnées d’avoir pris part à cette pratique ont également été arrêtées. La petite fille avait succombé peu après son admission à l’hôpital, le 10 août.

Cette mort intervient dans un contexte tendu en Gambie, où la question des mutilations génitales féminines divise profondément la société. Le pays avait pourtant été l’un des pionniers en Afrique de l’Ouest en interdisant cette pratique dès 2015, sous la présidence de Jammeh.

Mais depuis la criminalisation, seuls deux cas ont été poursuivis en justice, alors que la loi prévoit une amende et une peine de prison pour les contrevenants. Avec 73% de femmes et de filles touchées entre 15 et 49 ans, la Gambie figure parmi les dix nations africaines où l’excision sévit le plus, selon Apanews.

Un combat juridique en demi-teinte

Les législateurs avaient par ailleurs tenté de faire lever l’interdiction des mutilations génitales féminines suite à la condamnation de trois exciseuses, dont les amendes avaient été payées par un chef religieux. Parallèlement, la principale organisation musulmane du pays a émis un avis contestant l’illégalité de cette pratique traditionnelle.

Cette situation a provoqué l’indignation des organisations de défense des droits des femmes et des enfants. La mort de cette petite Gambienne résonne donc comme un rappel douloureux que les mutilations génitales féminines demeurent une réalité pour de nombreuses femmes dans le pays.

« Nous avions connaissance de cas, mais cela n’était jamais allé aussi loin. Lorsque j’ai été excisée, j’avais 8 ans. Mais aujourd’hui, de nombreuses familles excisent leurs bébés âgés d’à peine une semaine, parce qu’elles pensent qu’une excision précoce permettra une guérison plus rapide, mais aussi que les gens ne le sauront pas », explique Fatou Baldeh, fondatrice de l’organisation Women in Liberation and Leadership (WILL), à RFI.

Un test de prise de conscience

Le député Abdoulie Ceesay, élu de Kombo North où s’est produit le drame, a appelé à faire de cette tragédie « un tournant pour réaffirmer l’engagement à protéger chaque enfant ».

« Le fait que la police donne l’alerte et communique publiquement, c’est très important. Car, avant, quand on signalait des cas de mutilations au commissariat, la police nous disait qu’elle n’interviendrait pas », confirme Fatou Baldeh.

« Cette fois, la police et les professionnels de santé ont lancé l’alerte, malgré la peur de la stigmatisation, des réactions négatives et du tabou autour de l’excision », ajoute-t-elle, voyant dans cet épisode un test pour mesurer la prise de conscience des autorités.


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