Mali : le souverainisme à l’épreuve

Malgré des relations tendues avec la France, c’est bien sur l’ancien colonisateur que le pouvoir malien doit compter pour mener à bien son projet de passeport commun aux États de l’Alliance du Sahel.

C’est une information précédemment révélée par Africa Intelligence et désormais confirmée par Jeune Afrique (JA). La confection des passeports maliens estampillés AES (pour Alliance des États du Sahel) a été confiée à une entreprise française, en l’occurrence « Idemia ».

À première vue rien d’étonnant, au regard de l’expertise avérée de ce groupe spécialisé dans la sécurité numérique et l’identité augmentée, fournisseur de ce service à plus de 600 gouvernements et organisations étatiques dans le monde.

De plus, le contrat signé entre son ancêtre baptisé Oberthur Technologies et l’État du Mali en 2015 reste valable jusqu’à fin 2025, d’après les informations communiquées par la société à JA. Le maintien de cet accord reste néanmoins une surprise.

D’autant qu’il aurait été scellé dans le cadre d’un pacte de corruption impliquant l’ancien ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et son fils, Thomas, selon les autorités établies à Bamako depuis le coup d’État contre l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) en 2020.

La France toujours sollicitée

Un juge d’instruction malien avait ainsi convoqué les deux précités le 20 juin 2022, pour des faits présumés d’ « atteinte aux biens publics et autres infractions aux dépens de l’État du Mali ». Plus récemment en février 2024, Idemia – encore elle – était accusée de retenir illégalement une base de données biométriques d’électeurs maliens.

De quoi justifier selon le chef de l’État de transition, Assimi Goïta, le report de la tenue de la présidentielle censée ramener le pays sur la voie démocratique. C’est dire que le Mali n’a raté aucune occasion ces dernières années pour nourrir son conflit vis-à-vis d’Idemia.

Et pourtant, l’entreprise reste aux commandes de la confection des passeports de l’État ouest-africain désormais en rupture de ban avec la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Un acte revendiqué comme souverainiste, mais non-traduit par les faits.

Car derrière Idemia, c’est bien cette France honnie par les putschistes de Bamako qui continue de s’impliquer dans une décision si stratégique que celle de la fabrication de passeport.

Une entrée en vigueur retardée

Toujours selon Jeune Afrique, les nouveaux passeports AES déjà mis à disposition de certains ressortissants maliens ne devraient pas permettre à ceux-ci de voyager au sein de l’espace Schengen avant mi-avril au plus tôt.

En cause, l’envoi tardif aux chancelleries occidentales établies à Bamako d’exemplaires témoins du document comme c’est d’usage. Les missions diplomatiques concernées auraient d’ailleurs insisté pour finalement les avoir le 10 mars dernier, à en croire JA.

Soit près de deux mois après la date du 29 janvier 2025 annoncée pour la mise en circulation des passeports.


Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*