La banque française est condamnée par la justice américaine à verser des millions de dollars de dommages et intérêts pour sa complicité présumée dans des atrocités commises au Soudan au début des années 2000.
Un jury populaire de New York a reconnu, vendredi 17 octobre, BNP Paribas coupable d’avoir facilité, par ses opérations financières, le financement du régime d’Omar el-Béchir entre la fin des années 1990 et 2009.
Le verdict prévoit le versement de 20,75 millions de dollars (17,8 millions d’euros) d’indemnisation à trois plaignants – deux hommes et une femme –, tous originaires du Soudan, et aujourd’hui citoyens américains.
Entesar Osman Kasher, 41 ans, Abulgasim Suleman Abdalla, 49 ans, et Turjuman Ramadan Turjuman, 66 ans, ont témoigné avoir subi tortures, brûlures et violences sexuelles infligées par les forces soudanaises pendant le règne d’el-Béchir.
« Nos clients ont tout perdu à cause d’une campagne de destruction alimentée par des fonds que la banque a contribué à rendre accessibles et qui n’auraient jamais dû l’être », ont plaidé leurs avocats, estimant que BNP Paribas fut l’un des piliers financiers du régime militaire à l’origine des atrocités.
Le poids d’une complicité financière
Selon les Nations unies, ce conflit aurait causé la mort d’environ 300 000 personnes et provoqué le déplacement de 2,5 millions d’autres entre 2002 et 2008. Les violences systématiques perpétrées contre les populations civiles durant cette période ont été qualifiées de crimes contre l’humanité par plusieurs instances internationales.
À en croire l’accusation, la banque française a soutenu le régime en lui donnant accès aux marchés internationaux pour exporter ses ressources, principalement pétrolières, permettant ainsi au gouvernement soudanais d’acquérir des armes utilisées contre sa propre population.
Pour leur défense, les avocats de BNP Paribas ont affirmé que l’institution bancaire n’avait aucune connaissance des violations des droits humains perpétrées au Soudan. Ils ont également soutenu que les plaignants auraient été victimes d’abus ou de torture indépendamment des opérations de la banque dans le pays.
Des antécédents judiciaires aux États-Unis
« Ce verdict n’est que le début pour BNP Paribas. C’est un présage de poursuites similaires pour défendre les droits de victimes qui sont maltraitées par des terroristes ou par des gouvernements voyous », a déclaré à l’AFP Michael Hausfeld, l’un des principaux avocats des plaignants, alors que la banque conteste vigoureusement la décision.
D’après un porte-parole cité par Le Monde, ce jugement « fait abstraction d’éléments de preuve essentiels qu’il n’a pas été permis à la banque de présenter lors du procès et repose sur une mauvaise interprétation du droit suisse ».
Ce n’est pas la première fois que BNP Paribas est prise pour cible par la justice américaine en raison de ses activités au Soudan. En 2014, l’établissement avait déjà accepté de verser une amende record de 8,9 milliards de dollars pour avoir violé les sanctions économiques imposées à plusieurs pays, dont le Soudan, l’Iran et Cuba.

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