En Mauritanie, la disgrâce de Mohamed Ould Abdelaziz

L’ancien chef de l’État vient d’écoper de 15 ans de prison pour des faits relevant de sa gestion du pouvoir. Le dernier acte en date de la descente aux enfers d’un dirigeant autrefois tout-puissant.

Que les temps ont changé en Mauritanie. Non content d’avoir déclenché une offensive sans précédent dans l’histoire du pays contre l’ancien président Mohamed Ould Abdelaziz, la justice en a récemment rajouté une couche concernant les charges qui pèsent contre lui.

Appelé le 14 mai 2025 à la barre dans le cadre de son procès en appel pour enrichissement illicite et blanchiment, l’ancien putschiste a vu de nouvelles accusations, dont l’abus de fonctions et de biens sociaux, le trafic d’influence ou encore le recel entre autres, retenues contre lui.

De quoi faire passer de 5 (en première instance) à 15 ans d’emprisonnement sa condamnation. L’ancien militaire aujourd’hui âgé de 68 ans a également été déchu de ses droits civiques et vu ses biens confisqués dans le cadre de ce qui s’apparente à une vaste opération de reddition de comptes amorcée par le pouvoir mauritanien.

« Il s’y attendait », confie à Jeune Afrique (JA) l’un de ses avocats et ami, Me Mohameden Ould Ichidou. Il serait pourtant difficile d’imaginer qu’Ould Abdelaziz avait prévu tomber aussi bas à son départ du pouvoir en 2019 après dix ans d’exercice. Tant l’ampleur de la chute se révèle importante.

Un homme définitivement hors-jeu

Dans une Afrique où les anciens dirigeants sont généralement peu condamnés pour crimes financiers, l’ex-président de la Mauritanie accusé d’être détenteur d’une fortune estimée par la justice à 90 millions de dollars, fait figure d’exemple.

« Mon unique erreur a été de lui avoir proposé de se présenter à la présidentielle et d’avoir appelé les électeurs à voter pour lui », affirmait l’ancien tombeur du chef de l’État Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi au sujet de son successeur et ancien chef d’état-major Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani.

Entre les deux, une amitié de plus de 30 ans a désormais viré en acrimonie depuis la fin du pouvoir d’Ould Abdelaziz. Lequel impute à l’actuel président la cause de ses démêlés judiciaires.

La pression internationale comme salut ?

« Il sait très bien que ce régime ne s’intéresse ni à sa condition, ni à la justice, ni à la loi », appuie Mohameden Ould Ichidou au sujet du condamné, alors que Ghazouani s’est toujours défendu contre les allégations d’instrumentalisation de la justice.

Alors que ses voies de recours s’épuisent une à une en Mauritanie en attendant le pourvoi en cassation annoncé par sa défense, seule la pression internationale – jusqu’ici absente – pourrait intercéder en faveur de Mohamed Ould Abdelaziz.

Des questions juridiques de fond telles que le respect ou non du statut de l’accusé, celui de son immunité ou encore la  légitimité de la juridiction à l’origine de sa condamnation, continuent de mobiliser le parquet et la défense. Celle-ci étant bien décidée à faire jouer les conventions internationales ratifiées par la Mauritanie en sa faveur.


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