
Natasha Akpoti-Uduaghan, qui accuse le président de la Chambre haute Godswill Akpabio de l’avoir plusieurs fois harcelée sexuellement, a été suspendue pour six mois par l’institution.
Son nom fait depuis deux semaines le tour des médias et autres réseaux sociaux. Natasha Akpoti-Uduaghan, sénatrice de l’État de Kogi dans le centre du Nigeria, est devenue le visage de la résistance féminine contre les agressions et harcèlements sexuels.
Son bourreau présumé ? Le président du Sénat Godswill Akpabio qu’elle accuse de l’avoir harcelée sexuellement à plusieurs reprises depuis son entrée au sein de cette institution en 2023. Las d’être remis à sa place, celui-ci aurait en représailles manœuvré afin de faire suspendre la victime présumée de la Chambre haute pour les six prochains mois.
« J’ai été suspendue de mes fonctions illégalement, car j’avais dénoncé le harcèlement sexuel du président du Sénat », s’écriait Natasha, mardi 11 mars, en marge d’une réunion de l’Union Interparlementaire des Nations Unies à New York, donnant une résonance internationale à l’affaire.
La sénatrice privée de véhicule de fonction, de son personnel de sécurité et de ses indemnités le temps de la suspension « pour faute grave et indiscipline » d’après le sénat, mène désormais une véritable croisade contre Godswill Akpabio.
Une mécanique d’écrasement
« Peuvent-ils préciser exactement quelle est cette faute grave qui justifie une suspension de six mois, le lendemain du dépôt de ma pétition (contre le président du sénat) ? », s‘est demandé la femme de 45 ans dans une interview diffusée sur Sky News mercredi 19 mars.
Elle dénonce une « culture du silence, du harcèlement et de la peur, de l’intimidation entrelacée avec notre culture, où une femme est censée rester jolie, être vue, mais pas entendue », au sein du sénat. Une institution dirigée, à l’en croire, par un « président dictateur ».
D’après Natasha Akpoti-Uduaghan, Godswill Akpabio lui aurait demandé de « lui faire plaisir » si elle souhaite voir ses motions passer au sénat.
Un phénomène systémique
« Il y a eu une fois où je me suis précipitée au travail en oubliant de porter ma bague. Et il y avait environ cinq sénateurs à ce moment-là. Il a dit, oh, Natasha, vous ne portez pas votre bague. Est-ce une invitation à négocier ? », a raconté la sénatrice, en pleurs, cette fois au micro de BBC, à propos de Godswill Akpabio accusée en 2020 des faits similaires par Joy Nunieh, ancienne directrice par intérim de la Commission de développement du Delta.
« Que tu sois députée ou sénatrice, on ne te respecte pas dans ce milieu« , confie à l’AFP une ancienne assistante parlementaire à l’Assemblée nationale qui a préféré garder l’anonymat. Après dix ans de carrière dans l’administration de Lagos puis au Parlement, elle a fini par quitter son poste, exaspérée par les comportements sexistes quotidiens.
Le témoignage résonne avec la réalité vécue par de nombreuses femmes en politique au Nigeria, où les stéréotypes concernant leur légitimité persistent. Leurs voix sont marginales avec seulement 4 sénatrices sur 109 et 17 députées sur 360.
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