Au Kenya, le président William Ruto a annoncé mercredi qu’il ne promulguera pas la loi de finances contestée. Il a dû reculer face à la détermination des jeunes. Ces derniers ont largement utilisé les réseaux sociaux pour mobiliser la population. Désormais ils demandent la démission du chef de l’Etat.
Au Kenya, le président William Ruto a annoncé mercredi 26 juin qu’il ne promulguera pas la très contestée loi de finances publiques 2024. Il a reconnu qu’il ne dirige pas qu’un gouvernement, mais aussi et surtout « un peuple et le peuple a parlé ». C’est une véritable volte-face pour celui qui avait tenu un discours guerrier deux jours plus tôt.
Les jeunes saccagent le Parlement au Kenya
Ce retournement a été possible grâce à la détermination des jeunes. Ces derniers s’étaient mobilisés de façon pacifique les 18 et 20 juin, mais le pouvoir n’a pas voulu entendre raison. Le mardi 26 juin, jour d’adoption du projet de loi finances, ils ont à nouveau envahi les rues de Nairobi pour exiger le retrait du texte, aux sons des sifflets et vuvuzelas. La police a répondu par des tirs de gaz lacrymogènes, de canons à eau et de balles en caoutchouc.
Après le vote de la loi, plusieurs manifestants ont pénétré dans le Parlement, saccageant du mobilier et prenant des selfies. La police a tenté de les contenir en tirant cette fois à balles réelles. Selon l’organe kényan de protection des droits humains (KNHRC), une trentaine de personnes ont été tués, et plus de 300 autres blessées. L’ONU a réclamé que toute la lumière soit faite et que les responsabilités soient situées.
William Ruto a trahi le petit peuple
Le projet de loi de finances que conteste la jeunesse kenyane vise à mobiliser plus de 4 000 milliards de shillings (29 milliards d’euros) pour éponger une partie de la dette publique. Celle-ci s’élève à environ 10 000 milliards de shillings (71 milliards d’euros), soit environ 70 % du PIB. Parmi les mesures fiscales votées par les députés figurent l’instauration d’une TVA de 16 % sur le pain et une taxe annuelle de 2,5 % sur les véhicules à moteur.
En 2023 déjà, le gouvernement avait augmenté l’impôt sur le revenu et les cotisations de santé, et doublé la TVA sur l’essence. Avec ces mesures, la population pense que William Ruto lui a menti, lors de son élection en 2022. L’actuel président avait promis de défendre le petit peuple, alors qu’il ne fait que l’étouffer depuis. Désormais, les jeunes le surnomment « Zakayo », une référence à Zachée, le collecteur d’impôts de la Bible.
Les jeunes kenyans demandent désormais sa démission
La contestation a pris de l’ampleur sur les réseaux où la génération Z est fortement présente. Sur X notamment, un espace de conversation public a rassemblé jusqu’à 60 000 utilisateurs à son pic samedi. Les internautes ont discuté du projet de loi de finances publiques. Ils ont aussi largement partagé des informations sur la mobilisation et la répression de la police. Ce qui a permis de rallier d’autres jeunes jusqu’alors éloignés de la politique.
Grâce à leur détermination, les jeunes kenyans ont fait reculer le gouvernement sur son projet de finances. Mais ils ne comptent pas s’arrêter là. En effet, le mot d’ordre antitaxes est devenu anti-pouvoir. Depuis jeudi, les moins de 30 ans manifestent aux cris de « Ruto must go » (« Ruto doit partir »). Le président se retrouve ainsi dans une situation inconfortable, d’autant que la communauté internationale le tient à l’œil.
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