
Le magnat nigérian s’allie à Addis-Abeba pour ériger une usine géante de fertilisants. Ce partenariat public-privé pourrait transformer en profondeur une économie largement tributaire de son secteur agricole.
L’Éthiopie devrait bientôt figurer parmi les plus grandes productrices d’urée en Afrique et au-delà grâce à la construction d’une méga-usine à Gode, dans la région Somali. Annoncée fin août, cette infrastructure est le fruit d’un partenariat entre le pays est-africain et l’homme d’affaires nigérian Aliko Dangote.
Le milliardaire détiendra ainsi 60% des parts du projet estimé à 2,5 milliards de dollars, contre 40% pour l’État éthiopien à travers Ethiopian Investment Holdings (EIH), la société publique de gestion des investissements. L’usine disposera de deux lignes de production avec une capacité combinée impressionnante de 3 millions de tonnes d’urée par an.
Le calendrier de construction s’étale sur 40 mois, soit un peu plus de trois ans, pendant lesquels les deux partenaires assureront conjointement le financement et la supervision des travaux. Dans le cadre de ce projet d’envergure, un pipeline de 100 kilomètres sera construit pour acheminer le gaz naturel depuis le site de production jusqu’à l’usine.
De l’importation à l’exportation
Le Groupe Dangote, déjà fortement implanté dans l’industrie du ciment éthiopien, réalise ainsi une incursion majeure dans le secteur des fertilisants et renforce le développement industriel de ce pays situé dans la région instable de la Corne de l’Afrique.
Depuis des années, les agriculteurs éthiopiens souffrent de pénuries récurrentes de fertilisants qui limitent leurs récoltes et pèsent sur un secteur représentant près de 40% du PIB et employant plus de 70% de la population active.
Le nouveau complexe promet un approvisionnement stable et abondant, offrant aux fermiers l’espoir de meilleurs rendements. D’autant que l’ambition du projet dépasse largement la simple production d’urée.
Dangote Industries prévoit de fabriquer toute une gamme d’engrais, notamment des formulations NPK (azote-phosphore-potassium) dans différentes compositions : NPK 15-15-15, NPK 10-20-20, et d’autres variantes adaptées aux besoins spécifiques de l’agriculture éthiopienne et régionale.
Une stratégie continentale d’industrialisation
Cette diversification permettra à l’Éthiopie de répondre à l’ensemble des besoins de son secteur agricole. « Passer de zéro à 3 millions de tonnes, c’est bien plus que ce que l’Éthiopie consomme aujourd’hui », souligne par ailleurs l’industriel nigérian.
Ce projet intervient également dans un contexte géopolitique favorable, alors que l’Éthiopie qui vient d’inaugurer son tant attendu grand barrage hydroélectrique, cherche à diversifier ses partenaires économiques et à attirer les investissements privés afin de financer son ambitieux programme de développement.
Cette initiative s’inscrit dans la logique expansionniste de Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique qui a bâti sa fortune colossale en développant des industries lourdes à travers le continent. Il a ainsi fait de l’autosuffisance industrielle en Afrique son cheval de bataille.
Poster un Commentaire