Le pouvoir militaire au pouvoir depuis trois ans a décidé de verrouiller les frontières pour ses ministres, évoquant des motifs budgétaires.
Depuis le jeudi 10 octobre, il n’est en principe plus possible pour les membres du gouvernement guinéen, sauf accord exceptionnel du chef de l’État, de voyager à l’extérieur du pays. Ainsi en a décidé une note signée du président autoproclamé Mamadi Doumbouya, révélée le même jour.
Les officiels en mission à l’étranger ont également été priés de regagner la Guinée « toute activité cessante », selon le document, alors que plusieurs ministres étaient en déplacement hors du territoire, à en croire l’AFP.
Officiellement, cette décision draconienne est justifiée par la « nécessité de rationaliser les dépenses publiques », selon les mots d’Ousmane Gaoual Diallo, porte-parole du gouvernement. Elle « renforce l’efficacité gouvernementale tout en assurant une gestion optimale des ressources de l’État », assure-t-il à l’Agence de presse française.
Une mesure d’austérité ou de contrôle ?
Le discours officiel sonne en effet comme une tentative de donner un vernis de responsabilité financière à une décision pour le moins inhabituel. S’agit-il réellement d’une mesure d’austérité ou plutôt d’une manœuvre visant à resserrer l’étau sur un gouvernement dont la loyauté être pourrait mettre en doute ?
La question est d’autant plus légitime que ce verrouillage des frontières acté jusqu’à la fin de l’année en cours intervient dans un contexte politique tendu. Trois après l’arrivée des militaires sur fond de promesses de jours nouveaux, l’heure est au désenchantement.
Les Guinéens, qui avaient placé tant d’espoirs dans ce changement de régime, se réveillent avec la gueule de bois. Le coût de la vie s’envole, symbolisé par le prix du sac de riz qui a pratiquement doublé depuis 2021. Les coupures d’électricité que l’on croyait en passe d’être résolues, persistent.
Un isolement croissant
Les médias, censés jouer leur rôle de contre-pouvoir dans cette transition démocratique, se retrouvent dans une relation tendue avec les autorités, rappelant de sombres souvenirs. La fragmentation du pays s’est par ailleurs accrue, isolant le général-président lui-même.
Celui qui aimait autrefois s’offrir des bains de foule, vivrait désormais quasi-reclus dans l’enceinte du palais Mohamed V, selon une récente enquête du magazine Jeune Afrique sur le sujet. Dans le même temps, la perspective de la présidentielle s’éloigne chaque jour un peu plus.
Ce tableau inquiétant dans un pays réputé pour son instabilité pourrait expliquer ce blocage de la mobilité des ministres. Peut-être une façon pour le chef de la junte de s’assurer un contrôle total de l’agenda et des activités de ses collaborateurs.
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