Nos radars ont récemment capté l’information. Lors d’un entretien privé organisé à l’arrivée de la première mission de Médiation de la CEDEAO, le président d’honneur du parti ADP-Maliba, Aliou Boubacar Diallo, a soufflé à l’oreille du médiateur, Goodluck Jonathan l’idée de se rendre à Nioro pour y rencontrer le Chérif de la localité, l’un des responsables religieux les plus respectés du Mali. Objectif : lui présenter le plan de sortie de crise et rallier l’influent leader à une solution pacifique.
Très discret depuis plusieurs semaines, Aliou Boubacar Diallo, le chef de file de l’ADP-Maliba et troisième de l’élection présidentielle de 2018, œuvre inlassablement à l’accalmie dans le pays. Son style politique déconcertant, marqué par une grande discrétion et un retrait volontaire des projecteurs, laisse peu de gens se douter qu’il agit dans les coulisses.
Le matin du 16 juillet, lorsqu’il est reçu par « son ami » Goodluck avant même les inscrits au programme officiel, certains acteurs jasent. « A quel titre il a été reçu ? », s’offusque littéralement un baron de la Majorité présidentielle. C’est sans savoir qu’Aliou Diallo et Goodluck Jonathan se connaissent de longue date et ont beaucoup d’amis en commun. A l’époque, le Malien est un jeune homme d’affaires introduit dans la haute sphère nigériane. C’est donc naturellement que lorsque la CEDEAO lance la médiation, Goodluck Jonathan invite son frère à le rencontrer pour un debrief officieux.
Lors de la rencontre, Aliou Diallo évoque plusieurs sujets parmi lesquels le risque politique incalculable d’une dissolution de l’Assemblée et l’influence du Chérif de Nioro sur la contestation en cours. Aliou Diallo, qui est très proche du Chérif de Nioro, estime que l’ancien président nigérian aura plus de chances de faire avancer le plan de sortie de crise s’il obtient au préalable son soutien.
Selon Aliou Boubacar Diallo la sortie de crise au Mali ne peut intervenir que selon certaines conditions : une nouvelle Cour Constitutionnelle, qui a d’ores et déjà été actée ; l’organisation de partielles dans les zones de contestation ; un gouvernement d’union nationale sur la base d’une feuille de route claire ; et des garanties quant à la sincérité des futurs scrutins. L’entrepreneur reconverti homme politique et le médiateur se quittent donc avec la promesse ferme d’un nouveau voyage pour rencontrer le Chérif de Nioro.
Goodluck Jonathan, arrivé à Bamako depuis le 10 août est, ce 12 août à Nioro du Sahel où il discute avec le Chérif de Nioro. Des entretiens, rien n’a pour le moment filtré mais tout porte à croire que le Médiateur ouest-africain devrait revenir de Nioro avec de bons espoirs de ralliement de l’incontournable bourgade sahélienne à la solution communautaire. Il faut dire que le Chérif a déjà laissé plusieurs signes d’apaisement apparaître. L’octogénaire avait récemment salué la prise en compte de ses préoccupations dans la formation du nouveau gouvernement ainsi que la démission de l’ancienne présidente de la Cour Constitutionnelle et du fils du Chef de l’Etat de la tête de la Commission Défense de l’Assemblée Nationale malienne.
Avant de se rendre à Nioro, Goodluck Jonathan avait appelé le M5-RFP (la coalition à l’origine des manifestations et de la contestation au Mali), à arrêter les manifestations et à « rester strictement dans le cadre du dialogue », jugeant positives les avancées qui ont permis l’installation de neuf nouveaux membres de la Cour Constitutionnelle. Un appel qui n’a malheureusement pas été entendu puisque ce Mardi 11 août, plusieurs milliers de Maliens ont manifesté dans les rues de Bamako à l’appel du Mouvement du 5-Juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) pour réclamer, à nouveau, la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta, mettant ainsi fin à trois de semaines de trêve. Les regards tournés vers Nioro, les observateurs mais aussi l’intermédiaire Aliou Diallo espèrent certainement qu’une première fumée blanche sortira.
Affaire à suivre…
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