Les ambiguïtés de Macron au Tchad

Le président français qui a longtemps prôné une relation franco-africaine à rebours de ses prédécesseurs n’a pourtant eu aucun scrupule à donner son onction à un coup d’État au Tchad. Une position incompréhensible pour de nombreux observateurs.

La françafrique a manifestement encore de beaux jours devant elle. Et ceux qui suivent la situation politique tchadienne depuis la mort d’Idriss Déby ont dû s’en rendre compte. Au président autocrate installé au pouvoir sous des vernis démocratiques succède désormais son fils, Mahamat Déby, 37 ans. Une succession dynastique de plus dans cette Afrique si coutumière du fait. Les exemples les plus récents s’étant déroulés au Togo avec Faure Èyadéma et Ali Bongo Ondimba au Gabon. On aurait pu en rester là. Sauf que cette fois, cela se déroule avec la bénédiction affirmée de l’ancien colonisateur.

Emmanuel Macron n’a en effet, pas hésité à adouber le fils Déby installé au pouvoir par un comité militaire transitoire au mépris de la constitution tchadienne. Celle-ci prévoit notamment qu’en cas d’empêchement, le président de l’Assemblée nationale, deuxième personnalité de l’État, prend la succession du président de la République le temps d’organiser de nouvelles élections.

Ce qui se déroule donc sous le regard complice et apathique de la communauté internationale, la France en particulier, est un coup d’État. Et les cris d’orfraie de la société civile du pays n’y feront rien. D’autant que, en plus d’avaliser cela, Emmanuel Macron a assuré le nouveau pouvoir de N’Djaména de son soutien lors d’un discours marqué par des mises en garde contre quiconque menacerait la stabilité du Tchad, aux obsèques du président défunt.

Un reniement

La situation est selon plusieurs observateurs politiques, à la fois sidérante et révélatrice du contraste entre les discours et les actes des dirigeants français en Afrique. En effet, la position macronienne au Tchad quitte la sphère d’une nouvelle relation revendiquée par le locataire de l’Élysée à son arrivée au pouvoir pour épouser celle de ses prédécesseurs. Comme nombre de ses pairs de la cinquième République, Emmanuel Macron s’acoquiner donc avec un dirigeant africain qui enfreint les règles au nom de la stabilité politique. Mais cette stabilité tant agitée pourrait contribuer à abîmer davantage l’image de la France au sein de l’opinion publique africaine, selon de nombreux diplomates interrogés par l’AFP. Car, font-ils remarquer, la nouvelle génération goûte de moins en moins ces habits de garant des potentats dont se pare bien trop souvent sur le continent l’ancien colonisateur.


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